Les démocrates ont toutes les raisons de se féliciter du coup de frein apporté à « l’irrésistible ascension » du « Rassemblement National ». Satisfaction qui oblige à doubler de vigilance demain ! Toute médiocrité dans le comportement des formations politiques qui précèdent le RN en nombre de sièges lui assurera les lendemains qui, hélas, le «réenchanteront .»
A ne pas perdre de vue: le RN a mobilisé onze millions d’électeurs au premier tour et, au deuxième tour, près de 1,7 millions de plus que les formations politiques qui, par les opérations de désistement, le précèdent.
Un scrutin à la proportionnelle qu’une majorité d’hommes et de formations politiques semblent vouloir souhaiter pour demain aurait donné, certes, plus de sièges au RN sans pour autant lui assurer une majorité. Ce système eut la préférence de Macron avant d’être la variante du « J’y pense et puis j’oublie… »
Plus de députés RN mais pas assez pour gouverner en pleine autonomie est-ce faire la courte échelle au RN ? Cela aurait eu le mérite d’établir un rapport de forces, reflet des programmes proposés. La situation présente fait qu’un homme très à droite sur l’échiquier politique a pu donner mandat à celui qui défend le programme de la gauche et même celle la plus honnie, dans sa dimension extrême. Et vice-versa au bénéfice des macroniens ou de LR !
Parler de magouille et de priorité donnée à la seule arithmétique politique est l’évidence. Et ce n’est pas très sain pour la démocratie.
Pire : ce sera doublé d’impasses dont on ne mesure pas encore, ou mal, les conséquences.
Lorsque Hillary Clinton devança très nettement Donal Trump au nombre des suffrages exprimés, les démocrates américains ne manquèrent pas de s’indigner ! Et ils n’avaient pas tort ! La différence est que, en France, dans un système à la proportionnelle, le pouvoir serait donné à une alliance sur la base de négociations à engager dans le recherche d’une majorité. Faute de cela, on risque de patauger à qui mieux mieux et ce sera la soupe à la grimace et, pire, le désintérêt des électeurs.
Macron a joué et perdu. Il a débuté en fanfare avec le « en même temps », illusoire avatar d’une politique menée au centre. Ensuite, li a négligé et déçu sa gauche en courant à larges foulées pour débaucher à sa droite tout en refusant un élargissement de sa majorité avec les Républicains. Aujourd’hui, li s’apprête à courir à gauche pour une formule bâtarde comme il les aime. Il échouera ! On ne sera pas dans la gadoue. Le pays aura les pieds dans la merde.
Revenons au RN. On a eu dix mille fois tort de parler de peste brune et d’évoquer les bruits de bottes. C’est insultant et méprisant pour les électeurs de ce parti qui, bien plus simplement, croient au miroir aux alouettes et espéraient de les voir voler. La campagne électorale a permis de vérifier qu’il n’y avait pas que des « brebis égarées » dans ce parti mais des troupeaux qui espèrent faire bien plus que bêler.
Contre-productifs cependant sont les arguments de ceux qui, à l’image de Dupont Moretti, utilisent sans cesse l’effet de manche qui consiste à dire que le RN est l’héritier de de ses pères fondateurs et des Waffen SS. Déception: le Garde des Sceaux est mieux inspiré lors de ses plaidoiries aux Assises.
Les recruteurs des Waffen S et tous ceux qui en ont la nostalgie opéraient en chaire de vérité sacrifiant les forces vives de leurs pays pour combattre une autre bête immonde: le communisme stalinien. La mobilisation contre le RN doit se faire à partir d’un constat bien plus préoccupant: ce parti prêche pour l’avènement d’une démocratie illibérale avec pour corollaire la suppression de droits et la soumission à une puissance militaire qui, impérativement, doit être combattue sans faux nez. Le RN marcher sur les traces de Victor Orban en Hongrie. Et au Parlement, il trouve la complicité du Vlaams Belang pour œuvrer à ses côtés. La volonté à peine masquée est de défaire les solidarités européennes et, à terme de nous fragiliser dans le concert des nations. Aujourd’hui, la bête est dans l’arène. Il serait regrettable et dramatique que la mise à mort soit celle du torero !
Et les électeurs du RN? Ils ont été malmenés et ils se sentent déclassés. Macron a fait le pari de l’Etat start-up. Cela promettait d’être audacieux et facteur de progrès. Il a choisi de prêter le flanc à la critique du corps social, des corps intermédiaires que, bien pire, li persista d’ignorer. lI a avancé, persuadé qu’il a toujours raison. Aujourd’hui, Les langues se délient. Il n’écoutait personne. Le joueur de flûte a mêlé toutes les notes. Plus personne ne le suit !
Mélenchon opère dans un délire semblable. Lui avant tout ! Son programme! Tout et rien que son programme! Avec en prime son délire communautaire qu’il croit être déterminant dans son butin électoral. Bien pire : la laïcité jetée aux orties ! Il vibre aux accents des « nouveaux damnés de la terre » que sont ceux qui donnent la priorité au Coran pour organiser leur présence en France et, surtout, assurer son plébiscite dans les urnes.
Subsistent les délicats problèmes de l’accueil aux émigrés, de la répression des délinquants. Il est temps que la juste réflexion s’organise au-delà des passions, des simplismes. Prendre racine à la réalité du terrain, des désagréments que l’absence de réponses appropriées fait vivre. Un débat recentré autour de la réalité est à faire vivre par et pour ceux qui y sont exposés en première ligne, sans tapage tribunitien dans le respect des droits humains mais sans les outrances droits de l’hommistes. Et, sur le terrain de l’action politique, ne plus se caricaturer en beau parleur et en petit faiseur, dépasser les vieux appareils et, bâtir ensemble ce que chacun pense, sans trop savoir comment le formuler, une exigence d’espérer.
Maurice Peeters