Il fallait retenir le conseil qui a le mérite de l’évidence : à jouer avec les allumettes, on se brûle les doigts. Surchauffer l’esprit, souffler sur les braises dans des cœurs qui n’identifient même plus leurs battements! Spectacle triste.
Inquiétant surtout. Gérald Darmanin est sans doute sincère, sans doute intéressé par une campagne élyséenne quand il s’affiche tel Saint Michel terrassant le dragon. Joli résultat à l’applaudimètre ! Moucher la droite républicaine ou celles qui s’impatientent à savourer des triomphes électoraux n’est pas pour déplaire. Mais pourquoi généraliser à l’ensemble du territoire l’interdiction de manifester pour la Palestine. C’est un droit qui connait des limites et l’intervention de al force est légitime, justifiée, quand cette manifestation s’écarte de l’esprit républicain, le bafoue et devient un hymne à l’intolérance, un soutien à l’islamisme le plus borgne et rétrograde.
La décision d’interdire sans distinction fut une vraie peau de banane : le Conseil d’État l’a retoquée. Mais Darmanin a engagé des dividendes, satisfait de sa bravoure. Et il est vrai qu’on lui aurait reproché le plus petit débordement et les incidents qui en découlent. lI y a une constante en politique : un ministre de l’Intérieur a la tête de turc. Cela va de pair avec la fonction ! Et le voilà qu’il claironne, sans en fournir la preuve, que Benzema, auréolé de son ballon d’or, a choisi d’aller monnayer ses talents sous des cieux qui « arment » sa conscience de « frère musulman. Pire : cela lui permet d’être le lance-torpille d’idées que ce mouvement relaie et encourage. Benzema affirme tout ignorer de cette organisation. Compliqué à croire ! Ses prises de position pour un Islam dur, rigoriste, caractéristique de l’idéologie frériste soucieuse d’occuper divers espaces de la société et notamment le sport sont connues. Il ne serait pas étonnant qu’il ait applaudi, voire encouragé, les jeunes pousses, graines de champions à venir avec leur tapis de prière dans les vestiaires.
Se souvenir que la France est un pays de droit. On interdit pas sans preuve et sur un coup de menton! Carton jaune pour le ministre ! Rouge pour les manifestants pro palestiniens fauteurs de troubles. Vous avez fait une faute, Monsieur Darmanin. Agir impétueusement de cette manière, la poudre risque d’être mouillée pour les batailles à livrer ! Le pompon à Nadine Morano, toujours aussi outrancière, irresponsable, qualifiant Benzema de complice des terroristes, de collabo. Et d’appeler de le déchoir de sa nationalité et de retirer le ballon d’or à l’ancien attaquant de l’équipe de France (97 sélections, 37 buts). La justice est saisie de plaintes déposées par Benzema. Le pire est de considérer que cette mascarade ne sera pas sans effets sur les esprits les plus prompts à dégainer leur haine.
Le joueur niçois Youcef Attal a utilisé les réseaux sociaux pour saluer le courage du Hamas. lI a été suspendu. lI s’est excusé. On se réjouira de l’initiative de Eric Cantona qui a utilisé le même canal pour dire que « Free Palestine » ne veut pas dire que vous êtes antisémite ! L’honneur du foot est sauf ! L’indignation de Benzema a choisi son registre. Plus que regrettable !Il pourra tenter de plaider la bonne foi, accuser ses accusateurs. A sa disposition, une batterie d’avocats richement rémunérés. Ses idées exprimées sur les réseaux sociaux ont déjà été lues avec ferveur par des millions d’abonnés et autant de « likes » ! Bonjour les dégâts. ! On s’interrogera alors comment la France peut être prise pour cible.
A gauche, c’est trop désolant pour s’étendre sur les coupables bêtises. Une fraction de la France Insoumise suit aveuglément leur chef qui ne sait plus quel drapeau de dictatures d’Amérique Latine sont à agiter dans les manifestations. Mais ce n’est pas si nouveau que cela : Michel Onfray rappelle opportunément la dimension historique qui fait de l’islamo gauchisme un fascisme: En 1972, des terroristes palestiniens de Septembre noir » abattent onze athlètes israéliens aux Jeux Olympiques. Comme à son habitude, Edwy Plenel, l’actuel patron de Mediapart s’illustre avec ce qu’il croit être le juste credo du journalisme. Ne se contentant pas de proposer une juste analyse du combat des Palestiniens, li approuve qu’il ait été froidement décidé d’aller au carnage. Et six semaines plus tard, Jean Paul Sartre, ayant constaté que la seule arme des Palestiniens dans la guerre est le terrorisme, estime que « ce peuple ne peut montrer son courage et la force de la haine qu’en organisant des attaques mortelles. » Quelle hauteur d’esprit, quelle clairvoyance ! Albert Camus dont Sartre moquait la tiédeur, se retenant d’ajouter les mots lâcheté et couardise serait la sagesse bienvenue pour désamorcer le grenades et ne plus souffler sur les braises. Rendez-vous aux JO de Paris !
Aux amis français qui m’interrogent sur la situation à Schaerbeek et Molenbeek, réputés être le vivier du djihadisme, j’ai quelque gêne à préciser qu’un ancien ministre de la Justice, longtemps bourgmestre de Molenbeek revendiquait avec fierté être l’ami de Tariq Ramadan, prophète à sa manière des Frères Musulmans.
Maurice Peeters, journaliste.